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Onze ans après la mort de l’opposant tunisien Chokri Belaïd, quatre personnes ont été condamnées à mort

Onze ans après la mort de l’opposant de gauche tunisien Chokri Belaïd, en 2013, quatre hommes ont été condamnés pour son assassinat, a annoncé mercredi 27 mars à la télévision nationale Aymen Chtiba, procureur général adjoint du pôle judiciaire antiterroriste. Après onze ans d’enquêtes et procédures judiciaires et quinze heures de délibération, le tribunal de première instance de Tunis a également condamné deux accusés à la prison à perpétuité, a fait savoir M. Chtiba. Ce dernier s’est félicité que « justice ait été rendue » expliquant la longueur des délibérés par « la nature et le volume » du dossier.
Des peines de deux à cent vingt ans d’emprisonnement ont aussi été prononcées pour d’autres inculpés tandis que cinq individus ont été acquittés même s’ils restent poursuivis dans d’autres affaires. Si la justice tunisienne continue à prononcer régulièrement des condamnations à la peine capitale, notamment dans des affaires de terrorisme, un moratoire est appliqué de facto depuis 1991.
Au total, 23 personnes avaient été inculpées pour l’assassinat dans sa voiture et devant son domicile, le 6 février 2013, de Chokri Belaïd, avocat de 48 ans et critique virulent du parti islamo-conservateur Ennahda (« Renaissance »), à l’époque au pouvoir en Tunisie.
Des djihadistes ralliés au groupe Etat islamique (EI) avaient revendiqué l’assassinat de M. Belaïd ainsi que celui, six mois plus tard, du député Mohamed Brahmi, 58 ans, une autre figure de l’opposition de gauche.
Les autorités tunisiennes avaient annoncé en février 2014 la mort de Kamel Gadhgadhi, considéré comme le principal auteur de l’assassinat de M. Belaïd, pendant une opération antiterroriste.
MM. Belaïd et Brahmi s’opposaient à la politique d’Ennahda, mouvement qui a dominé le Parlement et le gouvernement durant dix ans après la « révolution de jasmin », en 2011, jusqu’au coup de force de l’actuel président, Kaïs Saïed, le 25 juillet 2021, par lequel il s’est octroyé les pleins pouvoirs. Ces deux assassinats avaient marqué la Tunisie et constitué un tournant pour le pays, berceau des « printemps arabes », alors en pleine transition démocratique, en provoquant une profonde crise politique.
En juin 2022, Kaïs Saïed, qui a fait de l’assassinat des deux « martyrs » une cause nationale, avait ordonné la révocation de dizaines de magistrats dont certains sont soupçonnés, selon lui, d’avoir entravé l’enquête. Les familles et la défense des deux opposants tués ont accusé régulièrement au cours de la dernière décennie des partis politiques et certains juges de faire obstacle à la recherche de la vérité pour protéger les coupables.
Les proches de Chokri Belaïd ont régulièrement accusé le parti Ennahda de s’être au moins montré « indulgent » envers le discours des islamistes extrémistes qui s’était développé à l’époque. Mercredi matin, le mouvement a promptement réagi à ce premier verdict, estimant que les enquêtes policières et judiciaires ainsi que les condamnations prononcées « prouvent l’innocence » d’Ennahda. Le parti a dénoncé « une volonté de certains courants idéologiques et partis politiques de l’accuser à tort » de ces assassinats.
Le Monde avec AFP
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